« Autrefois, il existait une contrée lointaine, au Sud. Une contrée comme on n’en trouve pas dans le monde d’aujourd’hui. Là était la ville de Dale, ses marchés, connus à des lieues à la ronde, regorgeant des produits de la vigne et de la vallée : paisible et prospère. Car cette ville était située aux portes du plus grand royaume de Núhmeldor : Erebor. Place forte des Nains, descendant de la lignée de Dúrin, gouverné par Thror, roi sous la montagne, le plus puissant des seigneurs nains. Thror régnait avec la plus grande confiance, il ne doutait pas de l’avenir de sa Maison car sa lignée était assurée en la personne de son fils, et celle de son petit-fils. Ah… Erebor ! La splendeur de cette ville fortifiée, bâtie au sein même de la montagne, était légendaire. Sa richesse provenait de la terre, de pierres précieuses taillées dans le roc, et d’immenses filons d’or courant telles des rivières à travers la roche. L’habilité des Nains était sans égale, ils façonnaient des objets d’une grande beauté, incrustés de diamants, d’émeraudes, de rubis et de saphirs. Ils creusaient toujours loin dans l’obscurité et tous reconnaissaient la grandeur de leurs ouvrages. Mais les années de paix et d’abondance ne devaient pas durer. Peu à peu, les jours devinrent lugubres, et les nuits de veilles s’installèrent. L’amour de l’or était devenu chez Thror une passion dévorante… Une maladie avait commencé à s’emparer de lui, une maladie de l'esprit, et quand la maladie vous ronge, le malheur n’est pas loin. Le jeune prince Nain, nommé Thorin, alerté par le vent effréné qui semblait prévenir d’un ouragan, avait compris quelle menace les guettait. « Balin, sonne l’alarme ! Appelle tout de suite la garde ! »  « Qu’y a-t-il ? »  «Un dragon… Un dragon ! » C’était un cracheur de feu venu du Nord ; il s’était échappé des contrées de l’Arnor, attiré par les richesses du royaume des Nains. Smaug était venu. Ce jour-là vit des morts aussi cruelles qu’inutiles, car la ville des Hommes n’était rien pour Smaug, il visait un tout autre but : les dragons convoitent l’or avec une avidité féroce. Erebor fut perdu, car un dragon veille sur son butin aussi longtemps qu’il vit. Aucune aide ne vint de l'armée des Elfes ce jour-là, ni aucun autre jour depuis. Dépouillés de leur royaume, les Nains d’Erebor furent réduits à l’errance dans les Terres Désolées, peuple jadis puissant et désormais abattu. Le jeune prince nain accepta les besognes qui se présentaient et travailla dur dans les villages des Hommes. Mais il se rappela toujours la montagne qui fumait sous la lune, les arbres qui flambaient, torches de lumière, car il avait vu le dragon dans le ciel, et une ville réduite en cendres. Jamais il ne pardonna, et jamais il n’oublia. »